Renaud Ducoing et Vanessa Mecke : dépasser le regard masculin

Festival Armoricourt (Renaud Ducoing et Vanessa Mecke) © Lisa Farou

Le 26 novembre, Renaud Ducoing présentait son court-métrage, L’homme qu’il vous faut, au festival Armoricourt de Plestin-les-Grèves. Une romance interdite entre deux femmes, à l’aube de la Révolution Française. À l’heure où le regard masculin est remis en question, le cinéaste a reçu l’aide précieuse de la comédienne Vanessa Mecke. Rencontre.

Juillet 1749. Alors que les écrits des Lumières se répandent dans les campagnes, deux femmes se découvrent et s’aiment. La première est une jeune aristocrate, Adélaïde de Montalembert, qui s’apprête à rencontrer l’homme que son père lui a choisi pour mari. La seconde, Camille, se réfugie dans une tour de chasse pour fuir son passé.

Libération des corps, mais aussi de l’esprit. Dans L’homme qu’il vous faut, la romance est synonyme d’émancipation. Une relation tout en pudeur, où les sentiments prédominent sur le plaisir charnel.

Nullement sexualisée, il serait facile de croire à une écriture féminine tant elle sonne juste. Et pourtant. C’est bien un homme, Renaud Ducoing, qui est à la barre – quoique épaulé par la comédienne Vanessa Mecke. Le 26 novembre, ils le présentaient au festival de courts-métrages Armoricourt, organisé à Plestin-les-Grèves. Bien que repartie bredouille, l’œuvre s’est démarquée par la justesse de son écriture.

Renaud, vous signez une romance entre deux femmes, en plongeant dans leurs sentiments. Comment avez-vous évité l’écueil du regard masculin ?

Renaud Ducoing : Aujourd’hui, la légitimité est une grande question. L’homme a mobilisé les écrans de cinéma pendant des années. On peut dire qu’il a orienté le regard de la société elle-même. En revanche, je ne pense pas que l’homme doive pour autant se désemparer du sujet. Le point de départ du film, c’est le siècle des Lumières. S’il est question de remettre le peuple sur un même pied d’égalité, aucun philosophe ne met en avant l’égalité des sexes.

Vanessa Mecke : Quand Renaud et moi avons fondé une famille, nous avons constaté les inégalités entre nos deux sexes. Il faut une volonté personnelle pour s’en extirper. Au départ, j’étais peu convaincue par l’idée qu’un homme fasse un tel film. Mais pour Renaud, il s’agit d’une sorte d’enquête, de recherche. Je pense qu’il faudra, à un moment, parler ensemble. Qu’il faudra essayer d’établir un rapport entre les hommes et les femmes. 

Vous avez travaillé à quatre mains sur ce court-métrage. Comment s’est déroulée la collaboration ?

R.D : Elle m’a beaucoup aidé à la relecture, en se débarrassant de cette sensualité qui aurait pu mener vers la sexualisation.

V.M : Renaud a une vision plus masculine. En participant, j’espérais apporter mon regard sur la vie intérieure d’une femme. Je me souviens que, dans un premier temps, il avait songé à une scène de sexe. Je ne trouvais pas ça pertinent. Alors j’ai été radicale. Je lui ai dit : « ça, tu jettes. » Nous avons énormément échangé, tout au long du processus. Je l’ai accompagné lors de l’écriture, en lui glissant des idées. Nous avons aussi organisé les auditions ensemble. En tant que comédienne, je sais ce que signifie jouer un personnage. Il est parfois nécessaire de pousser plus loin. Je faisais aussi confiance à mon intuition, comme ça a été le cas lors des auditions. Mais j’ai accouché juste avant le tournage alors je n’ai pas été présente à ce moment-là. 

Les deux actrices ont une alchimie exceptionnelle. Comment cette relation s’est-elle forgée ?

R.D : Eva Lallier (Adélaïde de Montalembert) et Clémence Coullon (Camille) sont issues de la même promotion, au Conservatoire national supérieur d’art dramatique. Il s’agissait donc de deux amies, qui se connaissaient bien. Cela a offert la possibilité d’aller plus rapidement vers l’intime. Lors de son audition, Eva a présenté une version plus forte que prévue du personnage. Elle est venue challenger mon regard de réalisateur. Une démarche intéressante, pour un film qui porte sur la force féminine.


L’homme qu’il vous faut, par Renaud Ducoing. 47 minutes. Historique, drame. Diffusion en début d’année prochaine, sur Vimeo VOD et BITI VOD.

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