Benjamin Epps, départ d’une trajectoire de conquête

Il vient de commencer sa première tournée, est salué par la critique comme par ses compères, et est déterminé à prendre le trône de ses concurrents comme idoles. Au micro d’Impact, le rappeur Benjamin Epps parle de fierté, origines et ambitions, le début d’une trajectoire de conquête pour le nouveau prince du boom-bap français. 

Pour commencer, comment ça va, Benjamin Epps ?

Très bien, très bien, la première partie de la tournée vient de se terminer, la dernière date c’était à Besançon, où ça s’est très bien passé, super ambiance. Donc tout va bien, je suis content, tant qu’on peut tourner tout va bien.

Comme tu le disais juste avant, ce début de tournée, c’est ta première expérience sur scène. Comment le ressentais-tu avant de commencer ? 

En tout cas, pas comme une forme de stress. Quand j’étais au Gabon, j’avais déjà pu expérimenter un peu la scène, même si tout ça c’était une autre vie bien sûr. En réalité, je cherchais justement le contact avec le public, surtout après le confinement. Croiser des gens, échanger avec eux sur ma musique, ce qu’ils en pensent, voir leurs réactions en live, chose qu’on ne peut pas faire sur instagram, sur internet. 

Justement, comment sont les réactions “en direct” pour la fin de cette partie de tournée ? 

Bah bien ! Les réactions sont assez bonnes, on a déjà plein de propositions de dates pour 2022, des gros festivals avec des artistes comme Damso, Nekfeu, etc. Je suis fier de ce qu’on a pu déjà accomplir, ça veut dire que la musique est bonne, que le show est bon. La prochaine étape c’est d’améliorer tout ça, toujours améliorer. 

Durant ton adolescence au Gabon, tu étais adepte du RC, battle de rap, est ce que cela t’a servi pour tes débuts sur scène ? 

J’ai très très vite été au contact des gens, tu sais. Moi je viens de l’école battle, ça datait du collège, et ça se faisait devant déjà pas mal de monde. Tu pouvais te retrouver devant un gars avec 150 personnes derrière, donc rapper devant des gens, ce n’était plus vraiment un obstacle pour moi. L’obstacle c’était plus poser sa voix, reprendre son souffle. Par exemple, là, tu vois j’ai un petit rhume, j’espère je vais pas perdre ma voix sur scène tout à l’heure quoi. 

Dans ta musique, tu parles beaucoup de ton envie de réussir, de “prendre le trône du rap game”, d’où vient cette ambition, cette envie de réussir ? 

En tant que jeune rappeur, et jeune tout simplement, on a tous rêvé de faire la meilleure performance possible. Vous en tant que journalistes, c’est je sais pas, interviewer Macron le 14 juillet ça se trouve. Moi, mon rêve, c’est de faire le meilleur album possible. Que tout le monde dise que Benjamin Epps est meilleur que tous les autres. 

Le fait de marquer les esprits sur la longueur, c’est quelque chose qui compte plus que exploser sur l’instant présent.

Exactement. Et je suis un peu, pas dégoûté, mais peut-être un peu déçu. Je trouve que mon succès est arrivé trop vite. J’aurais aimé que ça monte vraiment progressivement. Qu’ au fil des morceaux, les gens se rendent vraiment compte qu’il y a un potentiel. C’est vraiment parti d’un coup. La dernière fois on m’a reconnu dans le métro, par exemple ! Ça veut dire que je peux plus cacher mes ambitions, qu’il faut que j’y aille quoi. 

Le fait de réussir aussi “brusquement” comme tu le dis, ça te met une pression de rester au niveau, de devoir garder le succès sur la longueur ?  

Totalement. Il y a un truc de “ça tu l’as fais, ça va être quoi la prochaine étape ?”. L’un de mes objectifs c’était d’avoir une interview avec Mehdi Maïzi par exemple, je me disais “putain ça serait cool”. Je pensais ça il y a deux ans, et c’est arrivé limite trop vite. Mais en fait, ce qui m’arrive, c’est aussi une récompense pour toutes les années de rap qui sont derrière moi tu vois, j’ai commencé à rapper il y a quinze ans quand même. Je me dis que c’est peut-être le processus normal des choses. 

Justement, comment on fait pour se construire une base d’artiste, quand on a une image qui est déjà connue publiquement ? 

Je pense que pour se construire une image, surtout à l’heure des réseaux sociaux, il faut garder une certaine mystique derrière qui on est. Je traîne souvent un peu sur Instagram comme tous ceux de mon âge, je vois les gens qui postent des photos de leur chien, leurs enfants, leur maison, et ça, ça peut tuer l’aura, l’espèce de mystique qu’il y a derrière un artiste. Ce qui fait que les gens s’intéressent à Nekfeu, c’est qu’il sait disparaître des radars, et ça crée comme une sorte d’envie chez les gens, on veut le voir ! Et je pense que ça, ça aide beaucoup. Bien sûr l’image compte, mais à mon avis il faut rester très pudique. 


Cover du dernier EP de Benjamin Epps “Fantôme avec chauffeur” réalisé en collaboration avec le Chroniqueur Sale

Dans tes textes, tu abordes souvent la violence, le crime, les armes. Est-ce par rapport à ce que tu as peut-être vécu dans ta jeunesse ou parce que ça correspond à l’ esthétique du boom-bap ? 

C’est un peu des deux en fait. Ceux qui connaissent le quartier où j’ai grandi savent que c’est un endroit assez dangereux. C’est un peu les méandres de l’Afrique subsaharienne, qui est marquée par une grande pauvreté avec ce que cela implique : maisons mal construites, pas d’eau, d’électricité. Donc quand tu grandis dans un environnement comme ça, si tu n’as pas d’éducation, tu tombes facilement dans tous les travers que la rue peut offrir à un jeune garçon. Et en même temps le rap c’est aussi du fantasme, de l’imagination. Moi, je n’ai jamais tué personne par exemple. 

C’est aussi dans l’idée de cette aura finalement.

Exactement. Il n’y a pas que de la violence dans ma musique, mais les gens recherchent quelque chose quand ils écoutent un artiste. Quand j’écoute Booba, je n’ai pas envie de l’écouter pleurer, ou faire un son sur sa mère. J’ai envie de l’écouter faire de l’autotune, du bon son pour ambiancer. 

Dans ton interview avec Mehdi Maïzi justement, tu évoque la place de l’album dans la carrière d’un artiste, que tu places très haut. Est ce qu’on doit s’attendre à encore de l’expérimentation de ta part, par le biais d’EP, ou un album est déjà en préparation ? 

Je suis en train de construire un album, mais c’est encore à l’état embryonnaire. A mon avis, je sortirai début 2022 un EP, qui conclura sûrement ma série de trois projets. Je voulais pas sortir d’album avant, comme beaucoup font, car je considère qu’il y a un vrai travail à faire sur un album, car c’est ça qui va rester dans l’esprit des gens. Alpha Wann par exemple, a sorti trois EP avant Une main lave l’autre, et le grand public retient Une main lave l’autre. On a presque oublié les projets précédents. 

Tu dis souvent que tu n’a pas atteint ton meilleur niveau de rap, est ce que l’album sera synonyme d’une apogée dans ta progression ? 

Totalement, c’est ça l’idée. Mes EP servent à me chercher, et je sens qu’il y a quelque chose qui est en train de s’affiner, que je suis en train d’aller vers quelque chose de très intéressant. Et c’est pour ça que l’album, ce sera peut-être pas mon meilleur niveau, mais il y aura déjà un peu de maturité. 

Tu ne t’es jamais vraiment dévoilé à travers tes projets, est ce qu’un album sera l’occasion d’en dire plus sur toi ? 

Est ce que les gens ont envie d’entendre ce que j’ai à dire sur moi ? Je ne sais pas. Est ce que c’est le moment ? Est ce que dire des choses sur moi serait vraiment intéressant pour ma stratégie ? Je pense que c’est des choses qu’on ne calcule pas vraiment, quand tu fais un album tu te mets dans un esprit, et tu ressors tes émotions. Si mes émotions du moment sont de dire ce que je fais, ce que je suis, je pense que je le ferai. 

Merci Benjamin Epps.

Merci les gars !

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