“Souvenons-nous de toujours oser” : le journal étudiant Impact souffle sa dixième bougie

Le journal étudiant Impact soufflait il y a quelques jours sa dixième bougie. L’occasion de revenir sur la création et l’histoire de cette revue que des générations d’étudiants se sont appropriées et ont fait évoluer.

Corédigé par Raphaël Ouptier et Anouk Toutain

« Impact existe encore ? Quelle bonne nouvelle ! ». Ne cachant pas leur étonnement, les premiers rédacteurs et membres du bureau du journal étudiant ont eu un sourire aux lèvres lorsque nous les avons contactés. Ils n’imaginaient certainement pas, le 15 mai 2014, en distribuant fièrement leur premier numéro, qu’Impact connaîtrait une telle longévité. Retour à la genèse de ce journal qui a marqué des générations d’étudiants de l’IUT de Lannion, et bien au-delà.

“Souvenons-nous de toujours oser”

“A Lannion, je m’étais rendu compte qu’il n’y avait pas de journaux papier”, explique Yonathan Van Der Voort, fondateur d’Impact. L’étudiant en journalisme voit grand. Son objectif : créer un journal fait “par et pour” les étudiants et lycéens de tous les établissements de la ville. Il décide de lancer une campagne de communication pour former une équipe à même d’assurer la gestion du titre. Le jeune étudiant en journalisme écume les établissements scolaires de la ville à la recherche de personnes motivées.

Pour définir la ligne éditoriale, une réunion est organisée. “J’ai fait une diarrhée verbale de 15 minutes. Je balançais des idées et les gens rebondissaient. J’aimais beaucoup l’idée d’une ligne éditoriale très forte”, rigole Juliette Surcouf. L’idée c’était “d’être engagé, d’avoir un Impact”, sourit l’ancienne étudiante en journalisme, qui travaille aujourd’hui dans la communication. La devise du journal, “Souvenons-nous de toujours oser”, témoigne de cet état d’esprit.

“Dans l’association, on avait des gens de l’ensemble des différentes écoles à Lannion”, explique Yonathan Van Der Voort. Dans sa première année, le journal tourne avec “une dizaine de rédacteurs” qui “se [réunissent] dans des salles fournies par la mairie”. Même si les étudiants d’infocom et particulièrement en journalisme sont sur-représentés, ce n’est pas du tout l’objectif, assure Yonathan, aujourd’hui journaliste reporter d’images pour M6.

Impact confisqué à Bossuet

Côté financement, Impact est très dépendant de différentes aides. IUT, Université de Rennes, ville de Lannion, Lannion Trégor Communauté…en 2014 et toutes les années suivantes, le journal reçoit quelques centaines d’euros d’aides de la part de différentes institutions. Parfois, les commerçants locaux peuvent également participer et bénéficier d’un encart publicitaire pour 30€. Cela permet à ses rédacteurs de le distribuer gratuitement à la sortie des établissements scolaires.

En avril 2015, Impact publie un dossier consacré au déclin des selfs. A cette occasion, Alexandre Hodicq, alors lycéen en terminale, décide de consacrer un article à la hausse du prix des repas au lycée Saint-Joseph-Bossuet. La Terrasse, un nouveau restaurant lycéen, avait été inaugurée à la rentrée 2014. Problème : le prix du repas monte à 5,50€ et est dénoncé par certains élèves et leurs parents. Trop cher, trop peu d’offres, des élèves pas toujours rassasiés en sortant de table… “ce nouveau self est donc «décevant»” assure Alexandre Hodicq dans le quatrième numéro d’Impact.

Le proviseur du lycée, Philippe Le Faou, n’apprécie pas la mauvaise publicité. Il décide de confisquer tous les numéros d’Impact dans son établissement. L’affaire s’emballe. Dans la presse locale, Atouma Diarra regrette le coût pour Impact de ses numéros confisqués quand Philippe Le Faou refuse “de commenter des bêtises pareilles”. “J’avais été convoqué dans son bureau un mois avant le bac. La colère qu’il avait fait. Il tremblait de partout, il était tout rouge. C’était lunaire” se souvient Alexandre Hodicq. Philippe Le Faou ne rendra jamais les près de 100 exemplaires confisqués.

Que la couleur soit

A la rentrée 2015, la présidence du journal est reprise par Atouma Diarra, étudiante en journalisme à l’IUT. Sa première décision est de passer le journal noir et blanc en couleur. “On avait voulu le colorer et le rendre un peu plus funky et attirant pour les gens”, raconte Tara Lagoutte, trésorière entre 2015 et 2016.

Le bureau “assez féministe-écolo” qui reprend Impact axe “sur des rubriques un peu plus culturelles”. Le fonctionnement se resserre autour d’une petite équipe d’environ 5 personnes, “vraiment des gens de l’IUT et surtout des journalistes” assure Tara Lagoutte. Le nombre de contributeurs augmente mais ils deviennent très ponctuels.

Impact récompensé

L’année 2016-2017 est une année parfaite pour Impact. Pleine de projets surtout. Julia Sirieix, alors présidente, retiendra les “petites nuits” avant la publication des numéros “pour tout corriger” quand Jérémy Nédélec, le trésorier de l’époque, retient surtout la formidable opportunité que représentait Impact. Cette année là, les étudiants planchent notamment sur sur un dossier consacré à la pornographie.

Mais l’évènement de cette année n’arrive qu’en juin, quand Impact est récompensé du prix “Coup de pouce” du concours Kaléïdo’scoop. Organisé par l’association Jets d’encre, ce qui était alors un concours annuel avait pour objectif de “valoriser l’expression authentique de la jeunesse à travers la France”, expliquait l’organisation sur son site web. Julia Sirieix était allée chercher le prix à Paris, avec Alexandre Hodicq et Mathilde Hérard.

En 2017, la nouvelle équipe décide de retravailler l’esthétique d’Impact. “Le magazine était vieillot”, raconte Aurélien Defer, vice-président. Leur idée, c’est de créer une rupture. En retravaillant le visuel, l’objectif était d’attirer davantage de lecteurs. “On a radicalement changé la maquette, on a apporté pas mal de cohérence et d’identité visuelle, on a modifié le logo et on a tenté des couvertures différentes d’avant”, égrène Dorian Girard, le secrétaire de l’époque. En 2017, l’équipe décide aussi “de faire tout un numéro en écriture inclusive”. “Ce n’était pas si difficile.”

Les objectifs en termes de diffusion sont atteints. Le journal était “assez connu par les gens”, explique Alexandre Hodicq. “On avait quelques retours de gens de l’IUT mais aimait voir les journaux qui disparaissaient chez les commerçants car on voyait que les gens étaient curieux et lisaient”.

“On ne savait pas comment gérer une asso”

L’année 2018/2019 est plus compliquée pour Impact. Les conférences de rédactions ne sont plus régulières, les étudiants de l’IUT reconnaissaient encore Impact mais à l’extérieur, personne. Impact n’est alors réellement connu que dans le département infocom. Le journal n’arrive même plus à écouler tous ses exemplaires. Un carton d’une centaine d’exemplaires ne sera ainsi jamais distribué.

“Cette année, on n’a sorti qu’un numéro”, se souvient Garance Diaconu, la présidente d’Impact. “On ne savait pas comment gérer une asso”, regrette l’ancienne étudiante en journalisme. Mais l’équipe apprécie tout de même de voir traîner des exemplaires ici ou là. “Ce qui est cool c’est aussi de ne pas avoir de comptes à rendre”, souligne Garance.

À sa reprise, en septembre 2019, la nouvelle équipe doit relancer un journal dans lequel “il n’y avait plus rien”, se souvient Léa Rouffaud. Une rédaction est reformée. Pleine de bonnes intentions, elle décide de marquer l’ancrage local d’Impact, de faire plus de dessins, d’enquêtes, de culture et de société. Cette année est aussi marquée par la création inédite de rubriques fixes.

Années blanches : “On a essayé de sauver les meubles”

En mars 2020, le confinement casse totalement la dynamique d’Impact. “Il y a plein d’idées qui fusaient mais le Covid a tout freiné”, note Léa Rouffaud. En 2021, dans un contexte de Covid, Impact tente de se réinventer et passe sur le web, délaissant le papier. Un projet en réflexion depuis plusieurs années, mais il a surtout été lancé à cause de problèmes budgétaires et organisationnels.

“On a essayé de sauver les meubles”, assure Manuel Magrez. Le journal perd progressivement sa ligne éditoriale. Impact n’a pas été très exigeant sur la rédaction et il n’y avait pas de ligne éditoriale clairement définie, “c’était plutôt un site pour s’exercer”. Le fait d’abandonner totalement le papier n’a pas été intellectualisé mais c’est ce qui se passe de fait. Valentin Stocquer, président en 2021/2022, et son équipe ont repris Impact uniquement pour faire survivre l’association mais sans réel projet. “C’est idiot que ça ferme juste vu que personne de notre promo ne veut le reprendre”.

En 2023/2024, Impact reste très inactif. Seuls quelques étudiants en première année publient quelques articles au cours de l’année. Les articles font en moyenne 15 à 20 vues, notamment grâce aux stories publiées sur le compte instagram d’Impact pour en faire la promotion. Les plus gros articles peuvent monter à 60 vues, mais rarement au-delà, explique Albane Galloyer, présidente en 2023/2024.

En vue de l’année 2024/2025, le nouveau président de l’association, Mano Le Bris, souhaite relancer le journal notamment en embarquant les futurs journalistes en première année et en tissant des liens avec les étudiants d’autres formations.

Corédigé par Anouk Toutain et Raphaël Ouptier

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